Laurent Debas
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L’avenir sera ce que nous en ferons
Pragmatisme et concertation : c’est aujourd’hui la philosophie de l’association Planète mer, c’est depuis longtemps le credo de son directeur Laurent Debas. Rencontre.
L’océanographe a les pieds sur terre. Laurent Debas, 55 ans, directeur et co-fondateur de Planète mer « aime le concret ». Son association et son équipe de 6 salariés travaillent à la protection de la vie marine et des activités humaines qui y sont liées. « Nous sommes dans le dialogue et la co-construction avec les professionnels, notamment les pêcheurs. » C’est ainsi le cas avec ceux de la prud’homie de Saint-Raphaël dans le Var. Cette association de patrons pêcheurs a créé au Cap Roux, au pied du massif de l’Esterel, l’une des plus grandes réserves de pêche de France continentale. 445 hectares dont les eaux claires abritent plus de 80 espèces de poissons, des mollusques, des crustacés et… de nombreuses convoitises. Sars, rougets, chapons, homards et langoustes sont ici les proies de certains pêcheurs à la ligne et chasseurs sous-marins peu scrupuleux. Depuis deux ans, un « partenariat étroit » s’est noué entre Planète mer et la prud’homie varoise. Ensemble, ils ont mis sur pied un programme de surveillance expérimental « et commencé à étudier l’évolution possible du statut de la zone » en y associant des pêcheurs professionnels et amateurs, des clubs de plongées, etc. « Impliquer les gens de terrain, c’est une garantie de succès, assure le directeur de Planète mer. Tout reste néanmoins à pérenniser. Il faut en trouver les moyens pour assurer une vraie surveillance et un suivi scientifique sur le long terme et enfin, mettre en place la bonne gouvernance. »
Les solutions passent par le dialogue et l’échange
Laurent Debas conclut ses études d’océanologie à l’aube des années 1990. Il soutient alors une thèse consacrée au changement de sexe chez le mérou en Polynésie française : « L’objectif était de mieux comprendre la reproduction de cette espèce d’intérêt aquacole qui, comme beaucoup de poissons, naît femelle et devient ensuite mâle. » Le jeune docteur a ensuite la possibilité de poursuivre dans la voie de la recherche mais ne se sent pas « fait pour passer [sa] vie dans un labo. Depuis tout petit, j’ai toujours voulu créer quelque chose, monter un projet ancré dans la réalité. » La réalité sera d’abord celle de l’Asie du Sud-Est. Laurent y décroche un poste d’« expert associé » au bureau régional de la FAO, l’organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture. Pendant deux ans, il sillonne le Cambodge, la Thaïlande ou le Vietnam. C’est l’époque du « développement dément » de l’industrie de la crevette. Une activité qui détruit les mangroves, ces hauts lieux de biodiversité, primordiaux pour la pêche vivrière, véritables remparts contre les tempêtes et les tsunamis. « J’ai mesuré à quel point un certain type d’aquaculture pouvait être destructeur ! »
Agir en faveur de l’intérêt collectif
De retour en France, il travaille quelques années au ministère de l'agriculture et de la pêche avant de « rejoindre le petit panda ». Le WWF France le recrute en 1998. « Une période constructive et passionnante » pendant laquelle Laurent planche par exemple sur le dossier de la politique commune de la pêche (PAC) afin de proposer une nouvelle organisation et gouvernance de la pêche en Europe. Il œuvrera aussi à la création du Sanctuaire Pelagos qui protège à lui-seul près de 4% du bassin méditerranéen, au lancement des missions « Cap Cétacés » qui se poursuivent 15 ans plus tard, participera à la relance du réseau méditerranéen des aires marines protégées (MedPan)… La route de l’océanographe croise alors celle de l’acteur, réalisateur et producteur Jacques Perrin. Laurent Debas devient conseiller scientifique et co-scénariste du film Océans. C’est aussi à cette époque qu’il rencontre Mathieu Mauvernay, juriste spécialisé dans l’environnement qui « réalisait un documentaire sur la Sea Shepherd Conservation Society », l’ONG fondée par le militant écologiste canadien Paul Watson. Tous deux imaginent une association qui serait « dans le concret, dans l’intérêt collectif ». C’est le projet Planète mer. Mais il connaît d’abord quelques difficultés : « On rame ! Nous sommes en 2008, c’est le début de la crise et il n’y a plus de financement pour les asso. » Le vrai départ a lieu deux ans plus tard. Planète mer s’associe au Muséum national d'histoire naturelle et monte BioLit. Ce programme de sciences participatives permet à chacun de contribuer à l’étude de la biodiversité du littoral. Le principe est simple. BioLit invite par exemple le public à photographier les algues brunes et les animaux qui y trouvent refuge (programme Algues brunes et bigorneaux), les espèces échouées dans la laisse de mer (programme Les saisons de la mer) puis à partager photos et observations sur le site biolit.fr. Résultat : des milliers d’observateurs volontaires collectent désormais des données dans la France entière. Elles permettront aux chercheurs de mieux comprendre l’évolution des écosystèmes littoraux. Mais pour Laurent Debas l’essentiel est surtout « d’avoir créé un lien entre les citoyens et l’univers de la science ».